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C’est le sentiment qu’on peut avoir à quelques jours du second tour des municipales. Comme nous l’expliquions le premier tour avait été le théâtre de certaines performances, modestes certes, mais notables de partisans d’un pouvoir politique breton.

Nous nous étions longuement étendus sur les performances des indépendantistes de gauche identifiés et élus lors de premier tour, à Cintré, Plounevez-Moedeg, Guingamp… Nous aurions aussi pu parler de l’élection de Lionel Henry à la tête de la mairie de Montreuil-Le-Gast, partisan bien connu d’une Bretagne réunifiée et souveraine et ne cachant pas son engagement à gauche, de Jean-Yves Kallag à Lannion qui entame un troisième mandat d’opposition et sur lequel on peut compter pour défendre notamment la langue bretonne.

Au moment où nous écrivons ces lignes nous ne savons pas quel sera le score de « Saint-Herblain en Commun » mais cette liste de Gauche, Écolo, Bretonne de la sixième ville de Bretagne avait tout de même gagné 30 % des suffrages au premier tour !

L’Union Démocratique Bretonne (autonomiste de gauche) et son allié Christian Troadec (réélu à Carhaix) de « Pour La Bretagne » pourront compter eux aussi leurs élus et faire un bilan plutôt positif de cet exercice électoral.

Mais c’est le deuxième tour des bords de Loire à Nantes qui fait ressurgir la Bretagne comme objet civique et politique.

Comme l’indique Le Télégramme dans son article du 7 juin, l’accord entre EELV et le PS et ses autres alliés stipule : « Dans un volet intitulé « Promouvoir la langue et la culture bretonne » (points 287 à 290 de leur « contrat de mandat »), Johanna Rolland et sa troisième colistière Julie Laernoes proposent, entre autres, d’« adopter un vœu demandant l’organisation d’un référendum sur la réunification de la Bretagne » et de continuer en indiquant que l’accord prévoit aussi que la Ville se dote d’« une instance pour engager une concertation avec l’État sur les modalités d’organisation de ce dernier ». Florian Le Teuf (candidat EELV, figure du milieu des supporters du FCN et opposant au Yellow Park) pourrait être chargé des questions bretonnes (dont le référendum) à la mairie de Nantes une fois élu, alors qu’il figure en 4ème position, même si l’UDB (également présente sur la liste de Johanna Roland mais dés le 1er tour) avait aussi introduit l’idée d’un tel « débat citoyen » dans ses accords.

Beaucoup dans la presse et sur les réseaux sociaux s’interrogent sur cette soudaine conversion et sur les limites de cet accord.

 

Mais ne boudons pas notre plaisir de voir la Bretagne, l’unité territoriale de notre pays devenir un objet de débat citoyen, surtout après des décennies de débretonisation !

Quelques soient nos réserves et interrogations, saluons là le fait que ces rapports de forces électoraux aient fait entrer dans les négociations le terme « référendum » et introduit ainsi l’idée que le droit de décider de l’avenir institutionnel de la Bretagne appartient au peuple breton.

C’est aussi le fruit du travail des adhérent·e·s de Bretagne Réunie, qui avaient marqué les esprits en rassemblant 100.000 signatures afin d’obliger (en vain) le Conseil Départemental de Loire-Atlantique à débattre de l’unité de la Bretagne dans le cadre du droit d’option.

Les votations auto-organisées par Dibab entre 2014 et 2015, assez nombreuses en Loire-Atlantique avaient aussi marquées l’histoire politique bretonne contemporaine et fait progresser l’idée d’un référendum sur l’unité de la Bretagne et la dévolution de pouvoirs à une « assemblée de Bretagne ».

Le sondage de septembre 2019, commandité par “DIBAB — Decidez la Bretagne” et le Breizh Civic Lab, mettait bien en exergue ce désir largement partagé des breton·ne·s de Brest à Clisson de s’exprimer sur l’avenir de la Bretagne.

Quelle méthode référendaire ?

La première crainte qui nous semble importante de rappeler, c’est qu’il est très risqué de laisser le gouvernement central déterminer l’objet de la question soumise au référendum et son périmètre. Et si l’on peux être sur que le Conseil Départemental de Loire-Atlantique ne voudra pas ouvrir la boite de pandore, c’est bien sûr vers la Région administrative Bretagne que l’instance chargée par la ville de Nantes désignera pour mener le débat va devoir se tourner.

Le Conseil Régional de Bretagne avait d’ailleurs pré-budgétisé en février 2020 une somme pour organiser un référendum sur l’unité de la Bretagne, sans en dire plus.

Et puis, si la question posée ne porte que sur le retour de la Loire-Atlantique dans la Région Bretagne — sans évoquer des avancées institutionnelles pour l’ensemble de la Bretagne en termes de souveraineté — tout laisse à croire que ce débat ne sera pas motivant.

Le sondage évoqué plus haut le rappelait déjà : ce sont les habitant·e·s du pays nantais qui sont le plus favorables à la prise de compétences d’état par la « Région Bretagne » ou une « Assemblée de Bretagne », et ce à la hauteur de 68 % des sondé·e·s. Et c’est le même chiffre qui ressort dans ce département sur l’opportunité d’organiser un référendum sur les compétences de la « Région Bretagne » !

Limiter le débat à la question de l’unité territoriale c’est jouer pour perdre et contribuera à confiner les échanges autour de l’histoire, de l’identité, du marketing territorial. Alors que l’enjeu doit se focaliser autour de la question démocratique et sociale et environnementale. En effet, quel serait l’intérêt pour les électeurs et électrices, d’une Bretagne réunifiée qui ne serait qu’une seule addition de conseils départementaux, si cela n’a aucun impact positif sur leur conditions de vie quotidienne ?

Quelle sociologie pour l’organisation du débat ?

On peut se réjouir du début de débat mais aussi faire part de ses craintes avec courtoisie quand on voit comment le débat risque fort d’être cantonné au sein des élus métropolitains. Toujours dans le même article du Télégramme on pouvait lire : « Et le sénateur Ronan Dantec de souligner en parallèle la probable nomination à la métropole d’Aziliz Gouez, anthropologue et ex-plume du charismatique président irlandais : “L’idée est de faire du pôle métropolitain Loire Bretagne un outil de dialogue entre territoires. Aziliz va œuvrer pour que Nantes, Brest et Rennes travaillent différemment”. »

Ainsi donc l’organisation du débat préalable au référendum serait élaboré, initié par les élu·e·s des métropoles ? Si on voulait opposer la Bretagne des petites « communautés de communes », celle des modestes intercommunalités à celle des métropoles où se concentrent équipements culturels de prestiges, transports, universités, emplois du tertiaire, etc… on ne s’y prendrait pas autrement…

Il suffit de jeter un coup d’œil à la liste de Nathalie Appéré pour le second tour des municipales à Rennes pour voir que parmi les noms de la liste (EELV/PS/UDB/Radicaux de Gauche/PCF), 42 d’entre eux sur 61 exercent des professions qualifiées de CSP +. La liste de Johanna Rolland à Nantes reflète le même genre de proportion de cadres, de chefs d’entreprises, de dirigeants, de possédants, de riches…

Cela illustre parfaitement le déséquilibre Est-Ouest en Bretagne. On voit bien où sont les lieux de pouvoirs réels.

Soyons sérieux : est-ce ce genre de sociologie habituée à un certain entre-soi des plus confortables qui va renverser la table si le gouvernement ne veut pas d’un référendum dans les termes choisis par les bretons ? Est-ce ce type de sociologie — celles des catégories socio-professionnelles supérieures — qui va incarner et percevoir le profond désir de justice sociale des classes les plus défavorisées, celles exclues des métropoles, celles exclues de la représentation politique ?

Bien sur que non… Car ces classes n’ont pas besoin d’un rééquilibrage réel des lieux de décisions, elles veulent surtout continuer à être l’interlocuteur raisonnable du gouvernement central pour négocier à leur profit quelques transferts de compétences.

16 ans de cogestion de la Région Bretagne par le PS et ses alliés (y compris EELV, l’UDB et tous les régionalistes) n’ont pas permis de faire progresser l’idée du droit de décider.

Ce dont nous avons besoin c’est d’un processus constituant pour que tous les breton·ne·s (et pas seulement les grands élus des métropoles !) puissent donner leur avis.

Une partie de l’alternative se trouvera dans la rue… Mais aussi dans les échéances électorales régionales et départementales de mars prochain. Couvrir la Loire-Atlantique de candidatures unitaires ou non concurrentielles pour les départementales pour affirmer la nécessité du droit à décider, de l’exercice d’autodétermination par voie référendaire, en défendant la démocratie directe, le partage des richesses, des mesures radicales en matière environnementale, est facile à mettre en place…

En « Région Bretagne »… certains autour de l’UDB et de Christian Troadec nous reparlent de « Oui la Bretagne », la coalition autonomiste des régionales de 2015… Mais « Oui, décidons la Bretagne en Commun ! » offrirait plus de perspectives pour imposer la tenue d’un référendum d’autodétermination, avec ou sans l’accord de Paris, dans le cadre du mandat 2020-2026…

C’est un scénario bien plus sûr pour mettre à l’agenda électoral la question du pouvoir politique breton, que la simple addition de forces vouées à fusionner avec le PS en négociant des postes de vice-présidence… Voter, décider, s’autogouverner en quelque sorte…

Sinon, bien sûr, la tentation de faire des listes plus ou moins testimoniales trouvera un peu d’écho pour faire entendre un autre discours.

Il suffit de le vouloir et de construire un accord programmatique pour quadriller le territoire de candidatures unitaire (aux départementales et aux régionales), d’un « Frente Amplio » de gauche, écolo, populaire, antilibéral, breton… dont la tenue du référendum sur la taille et les compétences de la Bretagne sera un point incontournable et non négociable.

Ce message subliminal sera-t-il entendu ?

Bretagne Info.

Après nous êtes entretenus,dans le cadre des élections municipales et communautaires 2014 avec Primael Petit, tête de liste St Herblain à Gauche toute ! / St Ervlan a-gleiz Penn da Benn ! et Arno Vannier de la liste Initiatives Citoyennes à gauche pour Douarnenez, Bretagne Info vous propose aujourd’hui de faire plus ample connaissance avec Lionel Henry, conseiller municipal sortant sur la liste “Vivre et agir ensemble’  à Montreuil le Gast, commune au nord de Rennes, et conseiller communautaire du Val d’Ille.

 

Mairie de Montreuil le Gast
Mairie de Montreuil le Gast

Bonjour. Pouvez-vous vous présentez en quelques lignes ?

LH : Je suis professeur d’histoire géo, né en 1970 à Rennes dans une famille modeste d’ouvriers. C’est l’école publique qui m’a permis de sortir d’un chemin tout tracé du fait de ces origines. Cette école publique aujourd’hui mise en cause, comme la plupart des services publics, par une idéologie ultra-libérale…

Militant breton depuis le lycée, j’essaie de défendre le principe de l’autogestion : la cellule communale, comme l’entreprise, est le lieu idéal de la souveraineté populaire, de l’expression démocratique directe. Personnellement, je me situe dans le cadre de la gauche bretonne favorable à une autonomie renforcée, librement choisie et définie par les Bretons eux-mêmes. Candidat aux municipales de 1995 à Rennes (candidat d’ouverture avec les Verts), de 2001 à Montreuil le Gast (liste alternative), j’ai été élu, comme la quasi totalité de la liste DVG ayant chassé une liste DVG proche du PS, dès le premier tour de 2008. Je suis également devenu conseiller communautaire sur le territoire du Val d’Ille. J’ai été l’un des deux membres de la mouvance radicale bretonne à participer à la liste Europe Ecologie Bretagne (Verts+UDB) lors des régionales de 2010.

A côté de ces engagements, j’ai rédigé quelques ouvrages sur la question bretonne : FLB-ARB, L’histoire (2006), Dictionnaire biographique du mouvement breton (fin 2013), participation à Histoire de l’UDB (avec JJ Monnier, 2014),… J’ai également participé à la réalisation du double documentaire vidéo consacré à l’histoire du FLB, diffusé sur France 3 en 2013.

Pouvez-vous présenter succinctement votre commune ?

Montreuil le Gast est une commune située dans le pays de Rennes, à 16 km de la capitale régionale. Bien que proche de Rennes géographiquement, cette commune de 2000 habitants appartient à la communauté de communes du Val d’Ille. Les élus communautaires, autant que les habitants, refusent l’intégration forcée dans Rennes Métropole, défendue par les élus rennais et le préfet. Nous avons bataillé pour rester indépendant, attachés à une forme de gouvernance démocratique et opposés à une métropolisation du territoire breton sur les deux capitales, Rennes et Nantes.

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Vous êtes conseiller municipal sortant. Quel bilan tirez-vous de votre expérience ?

Ce mandat m’a permis de participer activement à la vie de la commune et du Val d’Ille, de m’y faire entendre. J’ai assuré la rédaction d’une chronique sur le patrimoine local et l’histoire de la Bretagne (frontières, langues, rois,…). Il s’agissait de donner aux habitants quelques notions d’histoire locale et bretonne. Un ouvrage devrait en être tiré prochaînement.

Pouvez-vous nous présenter les grandes lignes du programme de votre liste en matière économique, sociale, d’aménagement du territoire et écologique ?

La liste défend quelques points forts comme la création de nouveaux équipements au service de la population, l’accueil de nouveaux habitants (mixité sociale), le soutien au lien social et au développement durable et la défense de la vie communautaire face à la métropolisation du territoire. Surtout, l’équipe défend l’idée d’une vie de village refusant de devenir une cité-dortoir. Nous avons mis sur pied une ambitieuse politique en faveur de la jeunesse qui porte ses fruits.

Quel travail a été effectué et sera effectué par l’équipe municipale en place sur la langue bretonne ?

Honnêtement, rien ! C’est la difficulté. Nous sommes en pays gallo et l’idée peut vite germer que nous faisons du colonialisme “bas breton” en Haute-Bretagne. J’ai envisagé un moment de mettre en place des cours d’initiation au breton mais n’ai pas eu le temps d’aller plus loin. Il y a une demande locale. Il y a de nombreux Bretons de “l’Ouest” sur la commune. Il n’est pas rare d’entendre parler breton, y compris en conseil municipal sortant (3 brittophones dont deux adjoints). Il y a sans doute un travail à faire sur la question de la langue, peut être avec la réforme des rythmes scolaires. Sur la même idée, le rassemblement de plusieurs musiciens trads locaux est en passe de déboucher sur la création d’un bagad local.

Quelle est la position de votre liste et la votre sur la réunification ?

J’ai fait voté, à l’unanimité, en 2011, je crois, le voeu de Bretagne Réunie sur la réunification. Avec un maire et un conseil pas très chaud au départ. Notre voeu a même permis de relancer un temps la campagne de voeux de Bretagne Réunie.

La Catalogne a organisé une consultation populaire par vote sur l’indépendance de leur pays. Ce type d’auto-organisation a été repris en Bretagne par 44=BZH lors d’une votation citoyenne sur la réunification de la Bretagne. Quelle est votre position sur ce type de consultation ?

Personnellement, et cela n’engage que moi, le référendum d’initiative locale ou populaire est l’essence même de la démocratie. C’est l’expression directe de la volonté populaire. A mettre en relation avec l’attitude fermée, sectaire d’un Jean-Marc Ayraut qui balaie d’un revers de main une volonté démocratique clairement exprimée et portée par les 2/3 de la population.

Merci beaucoup et bonne fin de campagne !