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Pourquoi est-il nécessaire de relancer la ligne Morlaix-Roscoff ?

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Avant d’aller manifester à Roscoff samedi 21 janvier il est intéressant de lire et diffuser les arguments des défenseurs de projet. La réouverture de la ligne est défendue par les militants UDB et PCF depuis de long mois. Les militants de la Gauche Indépendantiste aux cotés d’autres forces sont venus renforcés la dynamique et seront présents pour défendre ce choix logique au regard de l’urgence climatique.

Nous pensons que ce genre de dynamiques locales renforcent l’idée que la Bretagne est un espace cohérent pour construire des politiques publiques notamment en matière environnementale, un espace de mobilisations citoyennes où le peuple donne son avis sur les politiques d’aménagement.

Nous ne cachons toutefois pas nos profondes réserves concernant les arguments déployés autour de la LGV/TGV qui pour nous est un facteur de mise en concurrence des territoires et de la flambée des prix de l’immobilier.

Les militants de la Gauche Indépendantiste du pays de Morlaix.

Voici les arguments du collectif :

 

Nous vivons une période charnière en matière d’écologie et toute décision engageant l’aménagement du territoire ou des choix d’investissements sur l’avenir devrait en tenir compte.

Sur l’axe Morlaix Roscoff, c’est 5 millions de voyages quotidiens à l’année, tout mode de transports confondus. Les transports représentent plus du quart des émissions carbonées et les stations balnéaires, desservies par la route seule, connaissent des problèmes d’embouteillage.

Sur Morlaix/Roscoff, à l’heure du réchauffement climatique et en raison de l’importance du trafic routier (9000 véhicules/jour en basse saison et 13 000 en été selon les données de 2015), pourquoi vouloir renoncer à cette voie ferrée et la supprimer, alors qu’elle nécessiterait quelques millions de travaux que l’on consent facilement pour la route ou pour subventionner des équipements qui ne profitent qu’au transport routier?

3500 personnes vivent à Roscoff à l’année et 3500 y travaillent.

Cette ligne Morlaix-Roscoff a une vraie raison d’être. Au niveau économique: en raison du poids de l’enseignement supérieur à Roscoff, de la station biologique, de Perharidy et de la fondation Ildys, mais aussi des travailleurs et stagiaires de l’AFPA, du GRETA, des lycéens et étudiants qui pourraient se déplacer quotidiennement sur cette ligne, mais aussi du potentiel pour le fret ferroviaire.

Le train dans ce contexte de changement climatique devrait être l’épine dorsale des mobilités sur ce territoire en complémentarité des autres moyens de transport (bus, vélo…).

De notre côté, nous pensons que pour les transports du quotidien, pour les transports réguliers domicile-travail, ou plus occasionnels, le train et les lignes ferroviaires de proximité sont l’avenir.

 

 

En raison de la crise écologique et climatique tout d’abord: les transports qui produisent le moins de CO2, les transports durables, ce sont les transports en commun, et d’abord les trains. Or, la France a plus d’un train de retard dans l’investissement sur les mobilités ferroviaires: on y consacrait en 2021 45 euros par habitant, contre 103 euros par habitant en Italie, 124 euros par habitant en Allemagne, ou 271 euros par habitant en Autriche. Sur 9000 km de voie ferrée, 1200 km sont en Bretagne, mais de nombreuses lignes sont en voie d’être abandonnées au profit du seul TGV ou des lignes les plus rentables.

Or, le train est un transport d’avenir également en raison de la crise sociale, de l’inflation qui touche nos concitoyens, touchant notamment le carburant, mais aussi des inégalités devant la mobilité, qui touchent particulièrement les ruraux, les jeunes, les personnes âgées, les moins fortunés. Un abonnement TER, c’est -25 euros par mois, et les entreprises et employeurs peuvent contribuer, c’est à relier avec le coût d’un plein d’essence ou de gasoil.

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Une véritable réfection de la ligne Morlaix-Roscoff, pour un coût d’environ 50 millions d’euros, nous engagerait sur les 50 ans à venir. En amortissement, cela représente 1 million d’euros par an, c’est vraiment pas grand chose pour un financement croisé entre l’État, la SNCF, la région, voire les collectivités locales de référence.

La ligne Morlaix-Roscoff, ce n’est pas qu’un coût, c’est aussi une valeur. Elle a une valeur patrimoniale, financière, touristique, économique, sociale. Elle a coûté de l’argent, beaucoup d’argent. On ne peut pas laisser ce patrimoine se dégrader et être ruiné ou détruit sans réagir parce que l’État ne jouerait plus leur rôle d’aménageur du territoire et d’investissement dans les infrastructures, pour leur entretien et leur modernisation. La SNCF n’a plus d’argent pour investir mais l’État n’utilise pas 10 milliards de taxes qu’il perçoit fléchés sur les infrastructures de transport, mais la SNCF fait 1 milliard de bénéfice cette année, avec son principal actionnaire, l’État.

Cette ligne ferroviaire Morlaix-Roscoff est abandonnée depuis juin 2018 suite à un éboulement localisé sur la zone de Sainte-Sève. Cette pluie d’orage est tombée à pic puisque SNCF Réseau avait prévu dans le cadre d’une politique de délaissement des lignes secondaires de desserte du territoire au profit du plus rentable l’abandon de la ligne en janvier 2019 . Cet abandon n’est que la suite d’une chronique amorcée par l’épisode de gestion du réseau par RFF qui qualifiait les petites lignes de « sans avenir » et d’une époque où on substituait les besoins de maintenance de la voie par des limitations de vitesse justifiées par la sécurité, mais expliqués réellement par les défauts de maintenance, qui rendaient le transport ferroviaire plus lent et moins attractif.

 

Cette ligne a été inaugurée le 10 juin 1883, à l’issue d’un chantier long de trois ans, construction du viaduc enjambant la Penzé comprise. Jusqu’en 1971, les trains de voyageurs quittaient Morlaix et s’arrêtaient dans les haltes ou gares suivantes : Taulé, Taulé-Henvic, Henvic-Carantec, Plouénan-Kerlaudy, Saint-Pol-de-Léon et Roscoff (et, une fois par an, à l’occasion des courses hippiques de, le train s’arrêtait en face de l’hippodrome saint-politain).

Entre 1957 et 1981, des centaines de wagons, par jour, quittaient la gare de Saint-Pol-de-Léon pendant la saison des primeurs (choux-fleurs, artichauts et oignons) à destination des autres régions de France, mais aussi vers l’Allemagne. Saint-Pol-de-Léon était la première gare légumière de France, voire d’Europe. Dans les années 60-70, la ligne employait une centaine de personnes.

En janvier 1984, la suppression de l’annexe B ter est notifiée (il s’agissait de réductions de l’ordre de 15 à 20 % consenties aux clients fret dans le cadre général d’une politique de désenclavement de la Bretagne).

En septembre 1990, la SNCF annonce la fin du trafic marchandises sur la ligne à partir du 28 janvier 1991 et laisse planer … une forte menace sur l’avenir du trafic voyageurs.

C’est le résultat et le lourd héritage des politiques d’abandon successives, laissant la part belle à la concurrence routière.

L’étude socio-économique de 2018 a révélé un potentiel de 230 000 voyages annuels (quotidien, étudiants, occasionnels et touristiques). A cela s’ajoute que dans les grandes métropoles françaises 1/3 des habitants ne possèdent pas de voiture. Et ce phénomène risque de s’accentuer car il est prévu la fin de la vente des véhicules à carburant fossile d’ici 2040 voire avant pour favoriser l’achat de véhicules électriques. Véhicules électriques chers à l’acquisition et qui de surcroît ne résoudront pas la problématique des encombrements sur la route…

L’attractivité de la voie ferrée Morlaix Roscoff serait forte pour le trafic voyageurs avec la liaison avec la desserte TGV et l’attractivité du littoral léonard, surtout avec une augmentation de la vitesse du train à 80 ou 100 km pour mettre Roscoff à 20-25 mn de Morlaix. Avec une augmentation des cadencements en privilégiant sur certaines heures des arrêts plus fréquents à Taulé, Plouénan, Henvic, PN 24 bis, etc. si on veut privilégier les trajets domicile-travail, les étudiants, les élèves. On peut aussi imaginer des trains spéciaux orientés plus pour le tourisme en haute saison avec des arrêts plus nombreux, une plus faible allure privilégiant les points de vue.

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